La "Magie" des boules de Noël ...
... Ou comment vérifier l'un des postulats de la théorie de la Relativité Générale d'Einstein !
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Observez les photos ci-dessus !
Voyez-vous l’anneau lumineux rouge au périmètre de la boule en verre ?
Il est plus visible sur la photo du dessous, prise sans flash.
Ce phénomène provient de la petite ampoule de guirlande électrique, située en arrière, pile au centre de la boule dans l’axe de l'objectif photographique .
Cette petite ampoule émet une lumière rouge qu’on distingue au centre, mais elle émet également dans toutes les autres directions, et une partie de cette lumière est déviée par le verre de la boule.
Ces rayons lumineux déviés donnent alors l’impression de provenir du périmètre de la boule en verre.
C’est le principe de l’image virtuelle que l’on étudie en optique géométrique.
L’idée en est rappelée ci-dessous :
Eh bien , figurez-vous que ce phénomène observé dans votre salon n’est pas très éloigné de celui des lentilles gravitationnelles, prédictions de la théorie de la Relativité générale d’Einstein, et qui font la joie des astrophysiciens du monde entier !
La déviation de la lumière
Depuis Newton, on sait que les corps massifs attirent les autres corps massifs.
Mais depuis Einstein on sait également que la masse et l’énergie, c’est pareil.
Hé oui ... E=mc² , c’est aussi ça que ça raconte !!
Et une des conséquences de la théorie de la relativité générale d’Einstein, c’est que les corps massifs attirent la lumière, et peuvent donc la faire dévier de sa trajectoire, d’ordinaire rectiligne. La possibilité de cette déviation a d’ailleurs permis la première confirmation expérimentale de la théorie d’Einstein.
En 1919, lors d’une éclipse totale de Soleil, Arthur Eddington a observé une étoile située quasiment dans l’axe du soleil, et il a pu mesurer que sa position apparente était en léger décalage avec sa position réelle attendue. Ce décalage était dû d’après les calculs d’Eddington à la déviation de la lumière de l’étoile par le Soleil, suffisamment massif pour cela.
Comme on peut le comprendre sur le schéma ci-dessous, cette observation n’a été possible que grâce à l’éclipse totale. En temps normal, l’étoile aurait été invisible à cause de l’éblouissement dû au soleil.
Cette observation d’Eddington fut la première confirmation spectaculaire de la théorie de la relativité générale qui valu à "Monsieur Albert" une gloire internationale, 4 ans après la publication de sa théorie !
Les Lentilles Gravitationnelles
En élargissant le terrain de jeu à l’Univers tout entier, on s’aperçoit qu’en observant l’espace avec de puissants télescopes, et avec une bonne dose de chance, on peut découvrir des effets spectaculaires de déviation de la lumière.
Ces effets se produisent quand la lumière d’une étoile ou d’une galaxie est déviée par un corps très massif, comme une autre galaxie ou même un trou noir.
Dans des cas particuliers, cette déviation donne naissance à un phénomène d’anneaux lumineux, très similaires à ceux de notre boule en verre.
On les appelle d’ailleurs les anneaux d’Einstein . (Voir photo ci-dessous)
L’explication est exactement la même que lors de l’observation d’Eddington.
Quand la source et le corps massif sont à peu près alignés, une partie de la lumière est rabattue par le corps massif, créant ainsi de multiples images de la source, qui se répartissent en anneau autour de l’axe de visée !
A quoi servent les lentilles Gravitationnelles ?
Tout d’abord les lentilles gravitationnelles confirment s’il en était besoin une partie de la théorie d’Einstein !
Ensuite , elles permettent de faire de très jolies photos astronomiques !
Mais surtout , elles nous apprennent des choses très intéressantes sur la matière parfois invisible qui compose notre univers.
En effet , lorsqu’un corps dévie de la lumière par effet de lentille, cela peut permettre de remonter à des informations sur sa masse.
Et mesurer la masse d’un objet astrophysique, ça n’est pas très simple en temps normal !!
Il s’agit même d’une technique de mise en évidence des planètes extrasolaires, moyen particulièrement adapté à la découvertes de petites exoplanètes, de masses proches de celle de la Terre !
Et tout ça sur votre sapin de Nöel !!
Etonnant ... non ?
Pour aller un peu plus loin ...
Parce que Noël , c'est aussi l'occasion de goûter à des mets et des spiritueux d'exception , voici un petit bonus "Physico-Chimique" sur la formation des bulles du Champagne !
Nature des bulles
Nous allons nous intéresser à la naissance d’une bulle de champagne, et voir en quoi les bulles d’un champagne nous renseignent sur sa qualité (ou pas.)
La première chose à savoir, c’est que comme pour la plupart des boissons gazeuses, les bulles du champagne sont des bulles de gaz carbonique, le fameux CO2 !
Oui ... le même qui est censé réchauffer la planète !
Mais rassurez vous , l’impact du champagne sur l’effet de serre est infiniment négligeable !
Ce gaz carbonique est un produit direct de la réaction qui transforme le sucre en alcool, ce qu’on appelle la fermentation alcoolique.
Cette réaction se produit grâce aux levures et au sucre que l’on ajoute au vin de champagne (qui initialement ne pétille pas !)
La réaction chimique se décompose ainsi :
Si cette étape de fermentation se produit au sein de bouteilles fermées (comme c’est le cas pour le champagne), le CO2 ne peut s’échapper et s’accumule à la fois dans le liquide et dans le petit espace libre situé juste sous le bouchon !
La "Loi de HENRY"
Le CO2 qui s’accumule sous le bouchon sous forme gazeuse fait augmenter la pression dans la bouteille. Cette pression peut atteindre plus de 5 bars, et c’est elle qui fait sauter le bouchon quand on ouvre notre bouteille. Mais une partie encore plus importante du CO2 demeure dans le liquide, sous forme dissoute.
Il n’est pas forcément facile de se représenter ce que cela signifie : il faut s’imaginer des molécules de CO2 plutôt isolées, et nageant au milieu du liquide mais sans se regrouper pour former des bulles.
La clé de l’effervescence du champagne (et des autres boissons pétillantes), c’est qu’il existe un équilibre entre la pression du gaz présent sous le bouchon et la quantité de gaz dissous dans le liquide. Pour faire simple, on considère que les deux sont proportionnels, et cette relation de proportionnalité est exprimée par la "loi de Henry" :
P = HC
P désigne la pression sous le bouchon (en bars), C la concentration de CO2 dissous dans le liquide (en g/L) et H est le coefficient de proportionnalité (qui pour le champagne à température de service vaut environ 0.5 bars/(g/L)).
Maintenant imaginez-vous ce qu’il se passe quand on ouvre la bouteille :
la pression en surface du liquide diminue brutalement, et l’équilibre est rompu : puisque la pression du CO2 gazeux a diminué, la concentration de CO2 dissous doit diminuer d’autant.
Autrement dit , le CO2 veut s’échapper du liquide et c’est ce qui provoque l’effervescence !
La Nucléation
L’ouverture d’une bouteille de champagne s’accompagne nécessairement d’un dégagement du CO2 dissous .
Mais ce dégagement n’est pas instantané !
Des bulles de gaz carbonique se forment dans le liquide et s’échappent.
La naissance d’une bulle s’appelle la nucléation, et nous allons voir que cette naissance ne peut pas avoir lieu n’importe comment, ni n’importe où !
En théorie, à partir du moment où l’équilibre a été rompu, les bulles peuvent se former de manière spontanée n’importe où dans le liquide : c’est ce qu’on appelle la nucléation homogène.
Cependant en pratique, cela ne se produit jamais ! Dans sa thèse sur le sujet , Cédric Voisin (doctorant en Physico-chimie de l'université de Reims) a calculé le taux de nucléation homogène, et il est si faible que même dans un océan de champagne, cela ne se produirait jamais même en plusieurs millions d’années !
L’autre mécanisme possible est ce qu’on appelle la nucléation hétérogène : l’idée est que la bulle ne se forme pas spontanément à partir de rien, mais utilise une petite poche de gaz préexistante pour faciliter sa naissance.
Une preuve indirecte que ce mécanisme est à l’oeuvre, c’est que dans un verre de champagne on observe clairement que les bulles montent en colonnes, comme si elles naissaient dans des endroits bien particuliers.
On a pensé un moment que de petits défauts du verre (comme des anfractuosités) pouvaient être à l’origine de la nucléation hétérogène des bulles.
Mais en pratique il faudrait des aspérités vraiment grosses – presque 1 millimètre calcule Cédric Voisin – , pour que le mécanisme fonctionne !
Il ne peut donc pas expliquer ce qui se passe dans nos verres traditionnels, qui sont suffisament lisses.
On peut néanmoins observer ce type de nucléation si on grave l’intérieur du verre avec par exemple , une pointe en diamant !
Comment ça marche ?
Si les anfractuosités du verre ne sont pas responsables de la nucléation des bulles , quoi donc alors ?
Le coupable a finalement été identifié par Gérard Liger-Belair (Laboratoire d'oeunologie de la faculté des sciences de Reims) : ce sont des fibres de cellulose !
A l’aide d’une caméra rapide et d’une lentille grossissante, il a été observé que dans la quasi-totalité des cas, il y a une minuscule fibre à la base d’une colonne de bulle. Ces fibres proviennent de l’atmosphère, de nos vêtements, des chiffons utilisés pour essuyer les verres, et fonctionnent comme de véritable usines à produire des bulles, comme l’illustre l’image ci-dessous .
En voici le mécanisme : ces fibres sont initialement creuses, et emprisonnent donc une petite poche d’air. Lorsque le champagne entoure la fibre, le gaz carbonique est attiré par la poche d’air et y pénètre en la faisant grossir.
Quand la poche chargée de CO2 atteint une certaine taille critique, une bulle se détache et monte dans le verre.
La beauté de la chose, c’est que ce détachement de la bulle laisse systématiquement un petit reste derrière lui, qui sert de poche pour initier la bulle suivante !
Ce mécanisme illustré ci-dessous permet bien de comprendre pourquoi les bulles sont produites en groupe, et avec une fréquence relativement régulière sur un même site de nucléation.
Bulles et qualité du Champagne ...
On entend souvent dire que la finesse des bulles est indicative de la qualité d’un champagne !
Cette idée n’est pas absurde a priori, puisqu’il est reconnu que les bulles ont un rôle essentiel dans les qualités gustatives de la boisson.
Lorsqu’elles montent dans le verre, elles se chargent en molécules aromatiques qui sont libérées lors de l’explosion de la bulle en surface.
Les bulles agissent donc comme un exhausteur de goût, et sans elles le champagne ne serait pas si savoureux !
Mais pour autant, est-ce vrai que la finesse des bulles indique un bon champagne ? Hé bien , non !
G. Liger-Belair a montré que la taille des bulles dépend essentiellement de deux facteurs : la quantité de CO2 dissoute et la hauteur du verre.
Moins il y a de CO2, plus les bulles seront fines, mais plus le verre est haut, plus elles grossiront avant d’atteindre la surface.
Donc , rien à voir avec la qualité de la boisson !!
Avec modération ... bien sûr !!
Joyeuses Fêtes à toutes et tous !!
Très amicalement !
Electron libre
(Philippe CLEMENT-BEAL)
Chamonix le 21 Décembre 2015
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Commentaires (4)
- 1. | 28/12/2015
- | 29/12/2015
- 2. | 05/04/2017
- | 06/04/2017
Bonnes année 2016